Philippe Lançon – Ed. Gallimard
Philippe Lançon, journaliste et critique à Libération et à Charlie Hebdo, assiste à la conférence de rédaction de Charlie, avec les Bernard Maris, Cabu, Wolinsky et autres troublions de la presse, de joyeux libertaires qui ne savent pas qu’ils vont tomber sous les balles de sinistres extrémistes. Ce 7 janvier à 11h25, il devient le témoin de cette tuerie. Chaque tir est ponctué d’un funeste « Allah Akbar », puis le silence s’installe. Il ne ressent rien, pas encore, à cet instant il sort de sa vie, de sa vie d’avant, de la vie des autres, les vivants. La vie d’après n’existe pas, n’a aucun sens. La suite n’est qu’instants brumeux, incertains, des souvenirs irréels. A l’hôpital, il ne connaît pas la douleur, il est la douleur. Il parle de moments où la minute suivante semble aussi peu accessible que le plus lointain Eldorado. Les passages au bloc se succèdent. Chloé sa chirurgienne fait preuve d’imagination et d’un professionnalisme forcené, elle va lui remodeler ce bas du visage qui a disparu. Ne nous y trompons pas. Ce témoignage bouleversant qui nous amène au bord de l’indicible, de l’insoutenable, nous tire vers le haut, hors de ce puits insondable dans lequel veulent nous jeter les fanatiques religieux aux cerveaux racornis.